Loudness War et pas que…
Depuis plus de 20 ans, la musique subit de grands outrages, ceux de la compression, dans l’indifférence générale.
La compression c’est l’appauvrissement, le nivellement par le bas, la perte. Or, ce qu on aime dans la musique, ce sont les détails, les variations, le médium…. Toutes ces choses qui vont générer l’émotion, le plaisir, l’addiction au son. Pour faire simple, on distingue deux compressions : la compression numérique des données et la compression dynamique.
A la fin des années 80 et au début des années 90, les allemands nous inventent le mp3, qui se répand comme une trainée de poudre. Fin des années 90 et début 2000, nous sommes tous bien contents d’avoir accès à cette médiathèque mondiale. Ensuite, c’est la gueule de bois. L’impact sur l’industrie est désastreux dans un 1er temps, puis génère un réveil des labels et des concerts, mais la distribution est dans le sac. Avec le recul, on se rend compte que le mp3, c’est de la merde en boite, c’est destructif.
Nous ne le dirons jamais assez, il est impératif de choisir des fichiers qui respectent le débit à l’encodage et qui ne génèrent aucune perte de données lors de la compression. Le streaming ne respecte pas ces deux conditions, à l’exception de Qobuz. Fort heureusement, avec l’élargissement des capacités de stockage, avec l’amélioration des players, les lignes bougent dans le bon sens. il n’y a qu’à voir les compatibilités audio des derniers smartphones. Donc l’espoir est de mise, de ce côté.
Pour la compression dynamique, la fameuse Loudness War, c’est plus alarmant. Je dois dire que j’ai pris conscience de ce phénomène plus récemment. Comme tout le monde, il suffit de passer de stations en stations de radio, pour s’en rendre compte (notamment les grands réseaux) : ça va beaucoup trop fort, ça manque de finesse et c’est insupportable, même dans sa voiture ou sur son smartphone dans les transports en commun.
La prise de conscience s’est poursuivie avec l’écoute approfondie. J’ai pris soin ces dernières années d’améliorer mon système audio, notamment sur la partie numérique (DAC) puisqu’il faut vivre avec son temps, hein ? Malgré le respect des formats de compression (voir plus haut – albums en 24bits / 88.2 Khz), j’étais insatisfait. çà sonnait parfois creux, il y avait beaucoup de dureté (crispant) et surtout j’étais obligé de baisser le volume alors que ça devrait être l’inverse ! J’ai encore changé des choses, câbles et autres, mais la solution n’était pas sur la partie mécanique/électronique. C’est là que j’ai lu des articles de plus en présents sur le net sur cette fameuse Loudness War, le problème vient donc du mastering, dernière étape avant la diffusion des albums.
Simplifions, vous allez sortir votre album, 1ère étape la prise de son (vous êtes en studio), 2ème étape le mixage et le montage, 3ème étape le mastering. Sur cette dernière étape, vous compressez la dynamique pour que çà sonne plus fort, problème vous perdez la richesse, la finesse et tout le boulot des deux premières étapes. Pire, le boulot d’écriture/composition est piétiné, au nom de cette guerre du volume.
C’est la course à l’échalote, course à celui qui a la plus grosse, ils sont légions à compresser à mort la dynamique, même des artistes et producteurs que nous chérissons tant. Tout cela ne sert donc rien, la musique j’en profite principalement à la maison, je n’ai pas besoin que ça soit plus fort. J’achète des disques pour prendre du plaisir, pour profiter des silences, des détails où se cachent l’émotion, le travail.
« Les conversions A/N et N/A sont les pires traitements que l’on puisse infliger à un signal » Bob Katz
Comment s’y retrouver ?
Dans la jungle de cette Loudness war, Il y a un outil : une base de données. Elle attribue à chaque album un score de dynamic range (DR) de 0 à 20, plus il est elevé, mieux c’est, selon l’échelle ci-dessous :
Plusieurs constats :
- on se fout vraiment de la gueule de ceux qui achètent encore des disques
- la plus grande méfiance s’impose dès que le support est sorti globalement après 1995
- les notes de DR varient fortement selon le support, il n’y a pas de règle du type : le vinyle est mieux que le CD ou encore un flac 24bits
- les remasters sont à fuir comme la peste
- la plus grande vigilance est de mise pour les nouveaux pressages de vinyle
TURN ME UP !
Pour ma part j’ai testé les scores, les supports, les différences sont flagrantes à l’oreille. Désormais, la consultation est systématique avant un achat, ça m’évite quelques frustrations. Et je pousse le volume, avec un grand sourire jusqu’aux oreilles.
Le grand public s’en fout, même si il se rend bien compte que ça va trop fort. Côté artistes, certains sont particulièrement attentifs à leurs productions, font appel à de vrais pros du mastering. L’espoir est mince, mais viendrait des ingérieurs du son selon Bob Katz.
J’espère que tout cela vous sera aussi profitable, que ce le fut pour moi.
Pour aller plus loin :
- cette étude de Master qui fait une parfaite synthèse de l’art de la guerre
- tout sur le mastering en douze leçons
- un portail bien conçu sur le sujet